Hormis l’île de Djerba, les hôtels des autres régions se contentent essentiellement de la clientèle locale.
Ridha Attia, expert international en la matière, ne perd pas pour autant espoir.
Pour la première fois depuis de longues décennies, nos hôtels tournent fatalement au rythme de «zéro touriste». Et en plein été SVP ! Du jamais vu par le passé, peut-être même depuis l’indépendance de la Tunisie. Dans les pays déchirés par la guerre ou en proie aux agitations sociales, ce constat n’aurait étonné personne. Mais que cela arrive dans une nation en paix et jouissant d’une flatteuse réputation internationale en matière de tourisme, voilà qui prouve à quel point cet indésirable intrus appelé «Covid-19» est dangereux et redoutable. Avant lui, souvenons-en, le sida, alors au plus fort de sa propagation rampante et dévastatrice, n’a pas suscité autant de peur et fait autant de dégâts.
Peine perdue
Et pourtant, la Tunisie a, jusqu’ici, tout fait pour continuer à aimanter les touristes et leur garantir un séjour sécurisant dans nos murs. En effet, outre l’efficacité, unanimement reconnue ailleurs, avec laquelle elle a pu mater le coronavirus, comme en témoignent les très honorables statistiques officielles, elle a tôt fait de rouvrir ses frontières, tout en établissant le système de classification des pays sur la base du niveau du risque épidémiologique lié au virus. L’étonnement le disputera à la stupéfaction quand on voit que la liste dite verte qui ne pose pas problème compte en son sein des pays qui, potentiellement et traditionnellement, constituent l’ossature de notre tourisme. Nous voulions citer la France, l’Allemagne, la Belgique, l’Italie et la Suisse qui sont, on le sait, considérées comme les plus attirées par la destination Tunisie. Paradoxalement, les touristes venant de ces pays ne sont plus revenus ici, et à l’exception d’un contingent de 150 touristes français qui ont débarqué récemment à Djerba, la parade habituelle des arrivées massives se fait toujours attendre. Ce qui est encore plus intrigant, c’est que les autorités compétentes n’ont pas été avares en incitations séduisantes à l’adresse des touristes : application rigoureuse des mesures de prévention contre la pandémie, tarifs de séjour promotionnels et plus bas que d’habitude, maintien du régime «all inclusive» fort prisé par la clientèle étrangère, offres gratuites de bavettes… Peine perdue !
Saison blanche ?
Bien que percutante, cette offensive de charme s’est donc avérée, du moins pour le moment, cruellement improductive. Pour en avoir le cœur net, il suffit d’une petite tournée dans nos hôtels qui sont, peut-on constater, dans leur presque totalité, désespérément vides, affichant un affligeant «zéro réservation étrangère».Tel est le cas d’un hôtel huppé de Monastir où nous étions de passage, l’autre jour. «A pareille période de l’année écoulée, déplore son gérant, nous étions au surbooking. Maintenant, plus qu’un revers de la médaille, je peux évoquer un désastre, puisque nous n’avons, jusqu’à présent, reçu aucun touriste, alors là aucun. On a dû se contenter des maigres revenus du tourisme local».
A Hammamet, on ne compte pas non plus les dégâts: des hôtels encore fermés, alors que d’autres se sont transformés en… bars. Dans cette morosité pesante, un hôtelier de la région nous a indiqué qu’il a été obligé de réduire jusqu’à 60% de ses effectifs, de sacrifier les programmes d’animation et d’arrêter les travaux d’extension qui ont démarré dans l’établissement à la veille de l’apparition du coronavirus.
Lueur d’espoir ?
Une éclaircie dans la grisaille, tout de même. Elle jaillit de la bouche même de M.Ridha Attia, expert tunisien en tourisme qui a fait ses preuves au sein de célèbres chaînes hôtelières de par le monde. «Il faut reconnaître que la situation actuelle de notre tourisme est exceptionnelle et extrêmement difficile, et les chiffres le prouvent. Toujours est-il qu’elle est loin d’être désespérante, à la seule condition toutefois que les professionnels du secteur ne baissent pas les bras et persistent à croire en la reprise durant les cinq derniers mois de l’année. Non, je suis persuadé, là -dessus, que nous sommes en mesure d’éviter une saison blanche, d’autant plus que l’Etat semble prêt à mettre la main à la pâte».
De quoi mettre du baume au cœur. Mais y parviendra-t-on vraiment ? That is the question.